Alors, voilà un poème, non pas de moi, mais de pierre Dac, célèbre pour sa participation à la BBC lors de la seconde guerre mondiale ainsi que pour ses journaux, L'Os Libre et L'Os à Moelle
Voilà le poème:
Soliloque à ma paillasse
Lorsque je te contemple, ô couche sans éclat
Si triste est ton aspect, de pile ou bien de face
Que dans le vain désir de te voir moins à plat
Je murmure à mi-voix: « Allons, ris donc, paillasse ! »
Comme l’a proclamé le divin Ménélas
L’espoir perd tous ses droits quand l’espérance est morte,
Il ne me reste plus qu’à dire: « Amen », hélas !
Devant le résultat que ta présence apporte.
Peut-être as-tu nourri la louable ambition
Au temps de ta jeunesse obscurément lointaine
De devenir, suprême et stérile illusion,
Un beau jour, matelas de pure et souple laine.
Vanité, vanité, tout n’est que vanité !
Ainsi, te voilà donc, grandeur et décadence
Offrant à tous regards, sur le sol cimenté
Le spectacle navrant de ta propre indigence.
En quels louches endroits, en quels sombres milieux
Te prostituas-tu pour que ta déchéance
En soit au point final ? quel complexe vicieux
Te fais solder ici ta dernière échéance ?
J’ai fait, pour t’amener à quelque repentir
D’infructueux efforts ; indéfendable cause
Rien ne peux t’adoucir, rien ne peut t’attendrir,
Mes os, mieux que quiconque, en savent quelque chose !
Alors, en un combat sans quartier ni merci
Je m’allonge sur toi, m’y retourne et m’y vautre,
Puis frottant au réveil mon corps endolori
« Lequel des deux me dis-je, aura la peau de l’autre ? »
Quand je m’endormirai plus tard dans un lit blanc
J’aurai pour t’évoquer des trésors d’indulgence
Car je me souviendrai qu’il fallait, de ton temps
Acheter le bonheur au prix de la souffrance.
Perre Dac le 16 Février 1942